La santé et l’environnement sont-ils solubles dans la chimie? Un cas d’école d’instrumentalisation des sciences par l’agro-industrie
Lettre ouverte à M. Mauguin, pédégé de l’Inrae, sur la participation problématique de l’Institut au colloque « Chimie et agriculture durable ».
La Lettre ouverte en téléchargement, dont une version un peu plus courte a été publiée le 27/11/2020 dans Reporterre, a été écrite par les scientifiques des ateliers d’écologie politique de Toulouse, Montpellier, Paris-Île-de-France et Rennes.
Communiqué de presse des scientifiques des ateliers d’écologie politique de Toulouse, Montpellier, Paris-Ile de France et Rennes, 27/10/2020 – repris par le journal Le Monde le 29/10/2020 :
Dans une lettre ouverte, des scientifiques dénoncent la participation de l’INRAE à un colloque organisé par la Maison de la Chimie le 4 novembre prochain. Ce colloque, intitulé « Chimie et agriculture durable : un partenariat en constante évolution » est analysé comme un cas d’école de manipulation de la démarche scientifique à des fins d’influence. En effet, il annonce viser un large public, en particulier les jeunes et le personnel enseignant, alors que son programme souffre de sérieux manquements tant du point de vue scientifique qu’éthique.
Sur le plan scientifique, la présentation de la journée privilégie une approche agricole productiviste, notoirement inadaptée aux enjeux écologiques globaux et aux questions scientifiques sur la transition vers des systèmes alimentaires durables. Sur le plan éthique, la journée est caractérisée par une sous-représentation des recherches agroécologiques, la sur-représentation des industries, très peu d’intervenantes féminines, et inclut un animateur de session connu pour ses positions climatosceptiques. Ainsi, alors que nos systèmes alimentaires sont un enjeu de bien commun, ce colloque défendra principalement l’intérêt des industriels de la chimie tout en prétendant présenter une résolution scientifique consensuelle aux controverses.
Le directeur scientifique environnement de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE) y est le seul représentant d’un institut de recherche public, apportant ainsi une caution académique à cette journée. Dans leur lettre, publiée sur le site internet de l’Atécopol, les scientifiques des ateliers d’écologie politique de Toulouse, Montpellier, Paris Ile de France et Rennes demandent au PDG de l’INRAE d’annuler la participation de son institut. Ils lui demandent également de mettre en place une ligne de démarcation forte par rapport à de tels événements car, selon les signataires, « les institutions publiques à vocation scientifique ont la mission essentielle de garantir l’absence de toute collusion entre la recherche académique et des intérêts privés qui pourrait se faire au détriment de l’intérêt général ».